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L'ENNUI PORTE CONSEIL

Publié le 06/09/2022
Cette citation de Gilbert Cesbron traduit le besoin fondamental d'ennui, un objet intellectuel particulièrement essentiel à la bonne santé de nos sociétés contemporaines mais pourtant vécu avec culbabilité.
Nos sociétés contemporaines semblent se caractériser par une intensité à toute échelle. La culture de l'information et de l'action permanente grignote le temps libre et les espaces de vide pourtant si essentiels à l'épanouissement des individus. Le culte de la performance, de la rentabilité et de la productivité, tant caractéristiques de notre XXIe siècle et de son rythme effréné, ne laisse que peu de place à l'ennui. L'ennui est vécu au mieux comme un échec ou une anomalie et au pire comme un nouvel espace à combler.

La culpabilité de ne rien faire valide les théories contemporaines de l'accélération et fait entrer l'individu dans un nouveau rapport à la modernité. L'ennui serait donc "l'ombre de la modernité" alors qu'il aurait nourri une multitude d'artistes et d'écrivains vers de grands moments de création et d'imagination infini. Donner sa place à l'ennui est donc, au regard de notre contexte historique, une inspiration à contre-courant des injonctions à l'action. Néanmoins, il apparaît essentiel de renouer paisiblement avec lui pour mieux appréhender nos quotidiens et pour ne pas vivre les moments, aussi différents soient-ils, comme des charges.

Les sciences humaines et sociales ont semblé ne pas énormément s'attarder sur l'ennui comme un objet d'étude à part entière. Au contraire, elles ont privilégié les affects tumultueux et les événements historiques les plus bruyants. Ce dossier a donc vocation à réaliser une synthèse des travaux à propos de l'ennui dans le sillage de la dernière parution de Didier Lapeyronnie avec pour objectif de défendre l'ennui comme une expérience enrichissante bien loin de l'image de "passion triste". 

En sollicitant à la fois des philosophes, des sociologues et des écrivains, l'ennui revêt des formes absolument différentes correspondant au fond à la multitude de nos expériences individuelles. Les représentations littéraires et artistiques sont peut-être celles qui ont su proposer à l'ennui ses plus grandes lettres de noblesse. De Flaubert à Tchekhov, en passant par Hopper ou encore Duras, les artistes ont fait de l'ennui un personnage et un contexte total où ils ont pu en extraire toute la complexité de nos sociétés modernes.

Nous nous retrouvons face à un paradoxe : l'individu contemporain est en proie d'une part à la suractivité et d'autre part à la peur de l'ennui éternel.

Comment faire sortir l'ennui de cet étau et quelle place lui trouver ?

Éléments de réponses et d'inspiration à suivre dans notre sélection.

LES REPRÉSENTATIONS LITTÉRAIRES ET ARTISTIQUES DE L'ENNUI

L'ENNUI : UN OBJET INTELLECTUEL À SAISIR