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La Rentrée Gallimard

Publié le 10/08/2022
Littérature française
Que reviennent ceux qui sont loin, Pierre Adrian, 25 août 2022, 9782072989681

« Là, sur la route de la mer, après le portail blanc, dissimulées derrière les haies de troènes, les tilleuls et les hortensias, se trouvaient les vacances en Bretagne. Août était le mois qui ressemblait le plus à la vie. »
Après de longues années d’absence, un jeune homme revient dans la grande maison familiale. Dans ce décor de toujours, au contact d’un petit cousin qui lui ressemble, entre les après-midi à la plage et les fêtes sur le port, il mesure avec mélancolie le temps qui a passé.
Chronique d’un été en pente douce qui commence dans la belle lumière d’août pour )nir dans l’obscurité, ce roman évoque avec beaucoup de délicatesse la bascule de l’enfance à l’âge adulte.

Les petites amoureuses, Clara Benador, 18 août 2022, 9782072990250

En 1941, dans la ville de Vienne en Isère vit la famille Léopold. Maurice et Elena ont trois enfants : Lola, la fille aînée âgée de douze ans et deux garçons jumeaux, surnommés les « Zazzos », qui ont neuf ans. De confession juive, la famille doit fuir la France, sentant le vent dangereux des persécutions sou.er sur le pays. À la hâte, ils chargent quelques affaires dans leur voiture et partent en direction de Marseille. De là, ils souhaitent embarquer sur un ferry pour rejoindre l’Angleterre. Mais seul un cargo peut les accueillir à bord, dans des conditions atroces, où périssent des dizaines de passagers. Ne pouvant gagner Londres en raison du blocus maritime allemand, le cargo débarque à Casablanca.
La famille Léopold entame une existence d’expatriés, dans cette ville foisonnante. Elena vit mal ce traumatisme qu’est l’exil, sa fille profite de son manque de vigilance pour traîner dans Casa. Lola découvre Bousbir, un quartier réservé où l’on prostitue de très jeunes femmes. Elle y fait la connaissance de Schéhérazade, une adolescente marocaine de son âge, avec qui elle noue une intense relation amicale. Cette amitié interdite la conduit peu à peu à quitter les vestiaires de l’enfance...

Le célibataire absolu, Philippe Bordas, Septembre 2022, 9782072987786

« Les proses nées de la main de Gadda humiliaient la stérilité du jardin parisien. Quatre siècles après Rabelais, l’entremetteur et marieur de tous les âges du français, l’encyclopédisme sauvage de Gadda rejouait les fiançailles entre langues hautes et dialectes populaires, proses savantes et jargons des bas-fonds. [...] Et c’est dans cette serre que je me suis immiscé, que me suis perdu, émerveillé, parmi ces profusions d’hybrides et de plantes grasses. »
Ayant découvert avec stupéfaction Carlo Emilio Gadda (1893-1973) alors qu’il est encore tout jeune homme, Philippe Bordas n’aura de cesse, sa vie durant, d’avancer dans l’exploration du mystère qui entoure l’œuvre et la vie de cet auteur majeur, l’égal de Joyce dans sa façon de réinventer la langue. Au point de suivre partout la trace de l’écrivain, depuis l’Italie jusqu’en Afrique, allant jusqu’à traduire des textes de Gadda alors qu’il ne connaît pas l’italien, conservant comme une relique la casquette imperméable de l’auteur qu’une
voisine de l’écrivain lui a offerte. Ce livre n’est pas seulement un hommage passionné à l’un des plus grands écrivains du XXe siècle. C’est aussi, et avant tout, un livre sur l’étrange voie par laquelle la littérature a envahi l’imaginaire de Philippe Bordas, colonisé sa vie entière et focalisé tous ses désirs de création.
L’auteur puise dans ses ressources langagières les plus débridées pour que sa contribution soit à la hauteur de son sujet et pour défendre sa vision intransigeante de la littérature. Un texte à la fois émouvant et combatif, au style éblouissant.

Clara lit Proust, Stéphane Carlier, 1er septembre 2022, 9782072991301

« Proust. Avant, ce nom mythique était pour elle comme celui de certaines villes – Capri, Saint-Pétersbourg... – où il était entendu qu’elle ne mettrait jamais les pieds. »
Clara est coiffeuse dans une petite ville de Saône-et-Loire. Son quotidien, c’est une patronne mélancolique, un copain beau comme un prince de Disney, un chat qui ne se laisse pas caresser. Le temps passe au rythme des histoires du salon et des tubes diffusés par Nostalgie, jusqu’au jour où Clara rencontre l’homme qui va changer sa vie : Marcel Proust.

Mourir avant que d'apparaître, Rémi David, 18 septembre 2022, 9782072967108

« Le l ce sera ton sol, le sol qui va te porter. [...] C’est une vie qui grouillera sous tes pieds, la foule, le monde et moi, nous serons le terreau dont tu te nourriras. Tu seras au-dessus mais tu nous sentiras. Tu vas vite dépasser, Abdallah, ta propre taille. Tente de te le figurer et tu verras ce que je vois, alors, depuis des mois ! »
Au centre de ce roman, la figure d’Abdallah, jeune Algérien avec qui Jean Genet eut une liaison passionnée au début des années cinquante, et auquel il consacra une manière d’hommage dans son célèbre texte Le Funambule.
Lorsqu’il le rencontre, Abdallah a à peine dix-huit ans, il a travaillé plusieurs années comme acrobate au cirque Pinder et vit désormais à Paris avec un ami, subsistant de petits boulots. Genet a quarante-cinq ans. Il est aussitôt ébloui par le charme de ce jeune analphabète. Il l’emmène souvent chez ses amis très chers, Monique Lange et Juan Goytisolo, et entreprend le projet fou de le hisser jusqu’à la gloire : son agilité, son expérience du cirque devraient lui permettre de devenir un artiste hors pair. Mais comment, après la chute, demeurer « le funambule » aux yeux de son amant, l’ange admiré, le prodige que le poète a forgé de ses mains ?
Rémi David restitue cette histoire d’amour et de fascination réciproque, dans un premier roman plein de justesse et d’empathie.

Qui sait, Pauline Delabroy-Allard, 25 août, 9782072968143

"Je suis sonnée, poursuivie par la vision des mains rouges sur la paroi de la grotte. J’aurais voulu mettre ma main sur celle de la roche. Toucher l’autre femme à travers les âges, traverser le temps. Oui, j’aurais voulu traverser le temps."
Alors qu’elle est enceinte, la narratrice Pauline entreprend de mener l’enquête sur l’origine de ses trois prénoms secondaires : Jeanne, Jérôme, Ysé. Pourquoi lui a-t-on donné ces prénoms-là ? Dans sa famille, on ne parle pas du passé. 
Fantaisie et drame, fantasme et réalité se mêlent dans ce roman hanté par la perte, qui nous entraîne sur les traces d’une arrière-grand-mère aliénée, Jeanne, puis à travers les ruelles de Sousse et le Paris homosexuel des années 80 en quête de Jérôme, enfin dans la Chine des années 1900, à la poursuite d’Ysé, l’héroïne de Partage de midi de Claudel.
Histoire d’une obsession, d’une errance et d’une renaissance, Qui sait raconte le non-dit et le manque, le chagrin et la folie, et la possibilité du salut. Quatre ans après le succès de Ça raconte Sarah, premier roman phénomène, Pauline Delabroy-Allard revient avec un opus virtuose et musical, ode à la toute-puissance de l’imagination et de la littérature.

Chienne et louve, Joffrine Donnadieu, 25 août 2022, 9782072987830

« Je veux respirer sur scène, entendre les trois coups chaque soir, incarner des personnages dont la puissance emporte tout sur son passage, me laisser envahir par des sentiments profonds, violents, extrêmes, commettre des crimes, des infanticides, des adultères, aimer éperdument, haïr follement, voyager à travers les époques, changer de sexe, m’empoisonner, mourir, renaître. »
Romy, 20 ans, arrive de Lorraine à Paris avec le rêve d’être comédienne. Pour subsister, elle danse et se prostitue dans un club de strip-tease à Pigalle, perruque fuchsia et string à paillettes, afin de payer le Cours Florent. Odette, vieille fille de 89 ans, la loge contre un loyer modique et un peu de compagnie, pour repousser le spectre de la maison de retraite. Cache-tétons et crucifix vont devoir faire bon ménage. Dans le huis-clos d’un appartement parisien qui n’a pas bougé depuis les années 50, deux femmes s’apprivoisent entre chien et loup, autour d’une ménagerie d’animaux en verre avec lesquels elles jouent pour régler des comptes. Au fil de leurs jeux, elles nouent une relation faite de fascination et de dépendance, en se renvoyant en miroir leurs corps meurtris, leurs solitudes, leurs folies, leurs enfances volées et surtout leur désir de vivre. Dans cette emprise mutuelle, jusqu’où seront-elles capables d’aller ?
On retrouve ici l’acuité du regard et la puissance viscérale de l’écriture de Jo6rine Donnadieu, qui décrit avec précision la violence des rapports sociaux, l’apprentissage du théâtre, la vie des corps.

L'Inclinaison, Corentin Durand, 18 août 2022, 9782072948619

« La peau, devenue soie céladon dans les reflets pâlissants de l’eau, était torturée de torrents de suif qui s’écoulaient depuis ses aisselles en ondoyantes rivières broussailleuses. La forme de ces lacets était parfois calquée sur les danses des algues saumâtres du fond des affluents et parfois, à la croisée des muscles, elle se muait en voûtes gothiques suspendues par leur seule gravité. J’observai par la suite, dans l’excavation du nombril, une toison mince et noire, calcinée, pareille à un feu qui s’achève, où naissait le déclin de l’enfance. »
Fuyant une vie nocturne inquiétante, un jeune homme rejetant ses désirs part pour l’Espagne. À l’ombre de stations balnéaires décrépies, il noue et dénoue des relations violentes et éphémères, teintées de petits trafics et de mélancolie. Au fil de son road trip improvisé, l’évocation de deux figures tutélaires – un écrivain oublié et un aîné mort du sida – éclaire pourtant ce qui, loin avant sa naissance, a scellé son destin.

Quelque chose à te dire, Carole Fives, 25 août 2022, 9782072989780

« Pénétrer dans la salle de bains de Béatrice Blandy. Faire couler l’eau brûlante dans sa baignoire. Verser quelques gouttes de bain moussant et se laisser glisser dans l’eau parfumée. Se sécher avec une serviette brodée aux initiales BB. Se coiffer avec la brosse de Béatrice Blandy, mêler ses cheveux châtains aux siens, plus bruns, plus drus, presque noirs. Ouvrir grand la penderie. Faire glisser de son cintre une robe Armani en satin de crêpe. Ouvrir la fermeture éclair et enlever la robe, ajuster les agrafes. Admirer comme le tissu tombe à la perfection. Tout partager avec Béatrice.
Son mec, son appart, ses fringues, pourquoi pas ? Elsa observa son nouveau reflet. Oui, elle n’était pas mal comme ça, elle était même pas mal du tout.»
Elsa Feuillet, jeune écrivaine, voue une admiration sans borne à Béatrice Blandy, une star de la littérature, de vingt ans son aînée. Quand elle apprend sa mort foudroyante, elle se sent orpheline et lui dédie son nouvel opus. Pour la remercier, le veuf de Béatrice Blandy l’invite à déjeuner dans l’hôtel particulier qu’il partageait avec sa femme. Par-delà leur différence d’âge et de milieu social, une idylle entre eux se noue, et Elsa va peu à peu se glisser dans la vie et l’intérieur bourgeois de sa romancière fétiche, parmi les photos de ce couple fusionnel, les souvenirs de leur bonheur passé. Mais qu’est-ce qui attire vraiment Elsa dans cette histoire, le veuf ou la romancière décédée, dont elle découvre peu à peu la part d’ombre ? Lorsqu’elle apprend que Béatrice a laissé un manuscrit inachevé, elle se met en tête de le retrouver...
Usurpation d'identité et supercherie littéraire sont au cœur de ce roman haletant où Carole Fives, mettant en scène une héroïne qui lui ressemble, brouille les frontières entre réalité et fiction. Dans une ambiance évoquant JF partagerait appartement de Schroeder et Rebecca de Hitchcock, elle raconte un jeu de miroir qui tourne au jeu de dupes, et signe un thriller littéraire troublant.

Le trésorier-payeur, Yannick Haënel, 25 août 2022, 9782072993091

C’est l’histoire d’un banquier qui veut tout dépenser. J’ai imaginé ce personnage un peu fou – illuminé – en découvrant à Béthune (Pas-de-Calais) une maison qui était reliée à la salle des coffres d’une succursale de la Banque de France par un tunnel.
Ce tunnel m’a stupéfié, et lorsqu’on m’a dit que cette maison appartenait au Trésorier-payeur de la banque, j’ai vu instantanément un roman : quel était donc cet étrange type qui avait ouvert une brèche dans sa propre banque ? J’ai imaginé la vie de ce Trésorier-payeur que j’ai appelé Bataille, en hommage à Georges Bataille, cet écrivain génial pour qui le cœur de
l’économie n’était pas l’épargne mais la dépense.
On est dans le Nord, à Béthune, au début des années 90. La fin des mines et les ravages du néo-libéralisme ont installé un paysage de crise.
Le jeune Bataille a arrêté la philosophie pour s’inscrire dans une école de commerce et voici qu’il décroche son premier poste dans la succursale de la Banque de France.
Dans cette petite ville dévastée par le chômage, sa vie prend la forme d’une aventure passionnée : protégé par le directeur de la banque Charles Dereine, il défend les surendettés, tombe amoureux d’Annabelle, une libraire rimbaldienne, s’engage dans la confrérie des Charitables, collabore avec Emmaüs et rencontre l’amour de sa vie, la dentiste Lilya Mizaki.
On y croise aussi le président Reagan s’extasiant sur les lingots d’or des souterrains de la Banque de France, ou encore Jean Deichel, le narrateur de mes romans précédents, Tiens ferme ta couronne et Cercle, dans un rôle secondaire.

Un homme sans titre, Xavier Le Clerc, 8 septembre 2022, 9782072987885

« Si tu étais si attaché à ta carte d’ouvrier, c’est sans doute parce que tu étais un homme sans titre. Toi qui es né dépossédé, de tout titre de propriété comme de citoyenneté, tu n’auras connu que des titres de transport et de résidence. Le titre en latin veut dire l’inscription. Et si tu étais bien inscrit quelque part en tout petit, ce n’était hélas que pour t’effacer. Tu as figuré sur l’interminable liste des hommes à broyer au travail, comme tant d’autres avant toi, à malaxer dans les tranchées. »
En lisant une série de reportages publiés par Camus dans l’Alger Républicain en 1939, Misère de la Kabylie, Xavier Le Clerc découvre l’enfant qu’a pu être son père, Mohand-Saïd Aït-Taleb, et ses conditions de vie. L’auteur retrace alors le parcours de Mohand-Saïd, homme courageux, analphabète et volontaire, si longtemps absent et mutique, embauché en 1962 comme manœuvre à la Société Métallurgique de Normandie. Ce livre est également l’occasion pour Xavier Le Clerc d’exposer son propre parcours. Né dans un village kabyle en 1979, il rejoint son père en France dans le cadre du regroupement familial.
Très tôt attiré par la lecture, par l’art, amoureux de la langue française, il se sent isolé au sein de sa propre famille. A l’âge adulte, constatant que son patronyme l’empêche de progresser socialement, il décide de changer d’état-civil et choisit le nom de Le Clerc, traduction de celui de son père (taleb : le scribe). Ce témoignage captivant est un cri de révolte contre l’injustice et la misère organisée ; mais il fait aussi entendre une voix apaisée, et donne à réfléchir sur les notions d’identité et d’intégration.


Petite Soeur, Marie Nimier, 25 août 2022, 9782072983962

« On n’a pas toujours besoin d’une chambre à soi pour écrire, il arrive que l’on ait besoin d’une chambre chez les autres. Une cage. Un enclos. Une pièce avec des rideaux que l’on
n’a pas choisis. Même s’ils sont moches, les rideaux, rayés dans le mauvais sens, avec des anneaux trop gros. Tu n’auras de comptes à rendre à personne, puisque personne ne te
connaîtra. Avec ce nouveau texte, c’est une nouvelle vie qui commence. Une vie sans ton frère. Ta vie à toi. »
Après la mort accidentelle de Mika, Alice, la trentaine, décide de se poser quelques semaines dans une ville inconnue pour consigner les souvenirs liés à ce frère avec qui elle s’est brouillée sept ans plus tôt et qu’elle n’a jamais revu. Par le biais d’une annonce, elle trouve à Quai Malo un appartement avec vue sur le fleuve en échange de menus services. Mais une fois sur place, rien ne se passe comme prévu : si le chat Virgile qu’elle est censée garder a disparu, le fantôme de Mika, lui, est omniprésent...
Par petites touches, Alice dresse son portrait. Celui d’un frère protecteur, plus jeune qu’elle, mais qui l’appelait « petite sœur », parce qu’elle était lente et rêveuse, et qu’il
ne supportait pas qu’on se moque d’elle. Un adolescent attachant, star des ateliers de théâtre donnés par leurs parents, qui est devenu comédien alors qu’elle s’est tournée
vers l’écriture et les jobs alimentaires« à la con ». Un jeune adulte avec qui, la vingtaine venue, elle s’est installée en colocation, et qui trouvait très amusant de les faire passer
pour un couple.
Ayant fait la rencontre à Quai Malo du peintre Tiago, avec qui elle redécouvre l’amour, Alice finira par lui révéler la raison de sa rupture irréversible avec Mika. Fantasque et émouvant, le nouveau roman de Marie Nimier, dans lequel on croisera une plante carnivore nommée Vanessa, une mystérieuse psy en ligne ou encore un peintre spécialisé dans le jogging-crabouillage, explore l’ambiguïté des relations fraternelles, le double visage des êtres que nous aimons, et le pouvoir des mots.

Une étrange obstination, Pierre Nora, Septembre 2022, 9782072995415

Le second volet des Mémoires de Pierre Nora : itinéraire d'un historien éditeur
« Cinquante-sept ans chez Gallimard et trente-cinq ans d’enseignement et de recherche, plus de mille livres édités, sept volumes des Lieux de mémoire, quarante ans à la tête du Débat, en faut-il davantage pour justifier mon titre ?
Je me suis souvent défini comme marginal central. Marginal, parce que je n’ai pas été un universitaire classique, ni un éditeur professionnel, ni un historien typique, ni un écrivain authentique. Encore qu’un peu tout cela.
Central cependant, parce que beaucoup des auteurs, beaucoup des idées d’une des époques les plus effervescentes et créatrices de la France contemporaine sont passées par mon petit bureau du premier étage de la rue Sébastien-Bottin devenue Gaston-Gallimard.
C’est ce va-et-vient dont, avant de disparaître, j’ai voulu laisser la trace. Les auteurs, les idées, l’époque. En mémorialiste et en historien. »
Après le succès de Jeunesse, Pierre Nora signe ici le second volet de ses Mémoires. Une étrange obstination est le récit émouvant d’un de nos plus grands éditeurs et historiens, qui, a connu l’âge d’or des sciences humaines, et fut aux premières loges du bouillonnement intellectuel de son temps.
En revenant sur son parcours, mêlant portraits, anecdotes savoureuses et genèse de ses travaux d'historien, il évoque avec passion ses années Gallimard et son compagnonnage avec différentes figures marquantes, parmi lesquelles Michel Foucault, Georges Dumézil, Marcel Gauchet ou encore Claude Lévi-Strauss.

Trouver refuge, Christophe Ono-dit-Bio, 25 août 2022, 9782072885693

Tout est allé très vite: d’abord, des gestes d’intimidation, puis des menaces directes.
Un soir, Sacha et Mina décident de s’enfuir avec leur fille Irène. Ils laissent derrière eux un pays qui a plongé dans le nationalisme, l’ignorance, l’intolérance, dirigé par un nouvel homme fort, qui a lancé des hommes après eux. Quel secret explosif veut-il protéger ?
Pour se mettre à l’abri, ils ont le projet insensé de rejoindre le Mont Athos, pourtant interdit aux femmes. Cet éden bordé par la Méditerranée, érigée de monastères, avec ses pèlerins et ses moines vivant selon les règles byzantines depuis le XIe siècle, a toujours protégé ceux qui cherchaient refuge. C’est un havre de paix à la beauté solaire et sauvage, un sanctuaire
voué au silence et aux prières, parfaitement autonome. Brutalement séparé de Mina, Sacha s’y retrouve avec sa petite fille, qui découvre, émerveillée, les rites et les récits du christianisme ainsi que les joies prodiguées par une nature grandiose. Mais le danger les guette à tout instant. Déterminer à tenter l’impossible, Mina parviendra-t-elle à les sauver ?
Ce roman est une ode lumineuse à la transmission d’un père à sa fille. Il est une invitation à trouver refuge dans l’amour et les livres, la nature et la beauté. Il célèbre aussi magnifiquement l’Histoire, et les histoires dont nous sommes faits, et dont notre monde est façonné.

La vie clandestine, Monica Sabolo, 25 août 2022, 9782072900426

« Je viens d’un lieu de ténèbres. Un lieu auquel j’ai essayé d’échapper durant mon existence entière, mais où je me rends simplement en fermant les yeux. C’est une prison familière, dans laquelle je marche sans jamais voir le jour, et qui se déploie sous la surface de la terre, à la façon d’un réseau de spéléologie, ou de catacombes.
Et même si j’ai quelquefois muré son entrée, croyant la rendre impraticable pour toujours, même si je frotte sans relâche pour nettoyer ma peau, la vérité est que je retourne là-bas, encore et encore, aimantée par une force invisible. L’attraction de ce lieu est celle, dissimulée, fourbe, qui m’a conduite à écrire ce livre, celle qui m’a emmenée jusqu’ici, auprès de ces êtres qui se promènent eux aussi dans les souterrains du monde. »
Ce roman d’une force stupéfiante, mêlant enquête documentée et récit intime, retrace les trajectoires de personnages qui n’ont qu’un point commun : la vie clandestine. D’un côté, les membres du groupe terroriste d’extrême-gauche Action directe, partisans de la lutte armée, qui ont revendiqué entre 1979 et 1987 des dizaines d’attentats et assassinats, et n’ont jamais formulé de regrets. De l’autre, Monica Sabolo, élevée dans une famille bourgeoise où régnaient le secret et le mensonge, à l’ombre d’un père aux activités occultes voire criminelles, mort sans un mot d’explication. À mesure que l’autrice, en quête de vérité, rencontre les membres d’AD, c’est aux fantômes et aux non-dits de son passé qu’elle se confronte.

Comment peut-on vivre en ayant commis ou subi l’irréparable ? Que sait-on de ceux que nous croyons connaître ? De l’Italie des Brigades rouges à la France des années 80, où les rêves d’insurrection ont fait place au fric et aux paillettes, La vie clandestine explore avec grâce l’infinie complexité des êtres, la question de la violence et la possibilité du pardon.

Littérature française